(Togo First) - Au Togo, les banques semblent avoir choisi leur camp. Selon les dernières données de la BCEAO, le commerce, le BTP et les services captent l’essentiel des crédits bancaires, laissant l’industrie et l’agriculture loin derrière. Un arbitrage qui reflète les choix des établissements de crédit.
Le commerce et le BTP en tête des financements
Avec près de 200 milliards de francs CFA des crédits à court terme en septembre 2024, le commerce reste le grand gagnant. Le commerce de gros domine largement avec 141 milliards de FCFA, tandis que le commerce de détail et la restauration se partagent le reste. Un signal clair : les banques préfèrent financer l’importation et la distribution, plutôt que la production locale.
Derrière, le BTP continue d’attirer les financements, avec 153 milliards de FCFA à court terme et 30 milliards à moyen et long terme. Une manne soutenue par les projets d’infrastructures publics et privés, dans un pays où la construction reste un levier de croissance important.
Enfin, les services aux entreprises et aux particuliers progressent fortement. Les prêts aux ménages atteignent 173 milliards de FCFA en août, signe d’un marché du crédit dynamique.
L’agriculture, le grand oublié du financement
Alors que le secteur agricole emploie plus de 60 % de la population togolaise, il demeure le parent pauvre du crédit bancaire. En septembre, l’ensemble du secteur n’a reçu que 698 millions de FCFA de financements à court terme, soit moins de 0,2 % du total des crédits. Même à long terme, les montants restent modestes (11 milliards de FCFA en septembre), loin derrière le commerce et les services.
Cette faiblesse s’explique en partie par le risque perçu par les banques, qui jugent le secteur agricole trop vulnérable aux aléas climatiques et aux fluctuations des prix. Mais elle souligne aussi un manque de mécanismes de financement adaptés aux exploitants agricoles, qui peinent à accéder aux ressources nécessaires pour moderniser leur production.
L’industrie ne fait guère mieux. Les crédits accordés aux industries manufacturières chutent à 49 milliards de FCFA à court terme, tandis que l’industrie extractive peine à mobiliser 1,6 milliard. Pourtant, ces secteurs sont stratégiques pour la transformation locale et la création de valeur ajoutée.
Pourquoi un tel déséquilibre ? D’un côté, les banques privilégient la rentabilité immédiate. Le commerce et les services offrent des rotations de capitaux rapides et des marges confortables, ce qui limite le risque de défaut. De l’autre, l’industrie nécessite des investissements lourds et un horizon de retour sur investissement plus long, un pari que les établissements financiers hésitent à prendre sans garanties solides.
Avec des banques focalisées sur l’importation, la consommation et l’immobilier, le Togo risque de renforcer sa dépendance aux importations. Faut-il réorienter le crédit bancaire vers des secteurs plus stratégiques ? La question est posée.
Fiacre E. Kakpo