(Togo First) - Avant les années 90, le Togo recensait 83 réserves naturelles sur l'ensemble de son territoire. Depuis les troubles sociopolitiques de cette période, et le relâchement des contrôles qui en a résulté, le pays a assisté à une perte graduelle de ce patrimoine, en raison de la forte pression humaine exercée. Aujourd'hui encore, bien que théoriquement le même nombre de réserves, pour une superficie globale d'environ 773 000 hectares, dont 628 000 hectares aient été convertis en parcs nationaux et réserves de faune, une part substantielle de ces territoires a été perdue en raison de l'intervention humaine. Ces espaces ont été reconvertis, soit spontanément par les populations locales, ou par l’entremise de l'État, pour la mise en place de plantations forestières productives, comme le relève l'Union internationale pour la conservation de la nature.
Avec des espaces de plus en plus envahis par l'activité humaine, qu'il s'agisse d'habitat, de cultures, de plantations d'essences exotiques, de zones reboisées, exploitées pour le bois, la chasse, le tourisme, ou même conservées dans des conditions difficiles, les nouvelles initiatives visant à préserver les aires naturelles prennent d’autant plus leur sens.
C'est notamment le cas du programme de gestion côtière WACA-ResIP, dont l'un des sous-projets s'attèle à préserver l'aire protégée de Togodo Sud. Cette dernière s'étend entre la région maritime et la région des Plateaux, à la frontière avec le Bénin, couvrant une superficie de 15 000 hectares. «Elle représente la seule aire protégée viable dans la région maritime, jouant un rôle crucial sur le plan écologique et pour la biodiversité. », explique Yawo Komi, coordonnateur adjoint du projet WACA, dans le cadre d’une visite à Tomety-Kondji, un village à une centaine de kilomètres de Lomé, et qui jouxte le parc.
Togodo Sud
Préserver cette aire protégée revêt également une grande importance pour «honorer nos engagements en matière de biodiversité et pour une gestion efficace de nos ressources naturelles et de nos forêts. Buffles, crocodiles, oiseaux, une multitude d'espèces diverses », souligne-t-il. Cette initiative, soutenue par la Banque Mondiale via le programme WACA, investit environ 1,065 milliard de FCFA pour la préservation de cet écosystème et l'assistance aux écogardes.
Le Parc de Togodo Sud, réserve faunique créée en 1952 avec une superficie de 18 000 hectares, a été requalifié en parc national en 2005 avec une superficie de 15 000 hectares. Il est bordé au nord par la réserve de faune de Togodo nord, à l'est par le fleuve Mono, au sud par les villages de Tométy Kondji, Sodomé, Adodomé, Gboto Zeve et Zouvi, et à l'ouest par la rivière Afan. Jusqu'à récemment, le site abritait l'espèce vulnérable et menacée du singe à ventre rouge (Cercopithecus erythrogaster), endémique au sud du Togo et au Bénin. Le parc est également classé site RAMSAR ( zone humide d'importance internationale », ndlr), abritant des forêts reliques de valeur spirituelle, scientifique, éducative, récréative et touristique, contribuant à la préservation des éléments écologiques, géomorphologiques, sacrés et esthétiques de la région.
Les actions du WACA
Les interventions du WACA dans ce cadre englobent un ensemble d'actions menées sur le terrain par l'Union des Associations Villageoises de Gestion des Aires Protégées (UAV GAP) et la Direction Régionale des Ressources Forestières (DRERF-M/P). Ces actions comprennent le renforcement de la surveillance de la réserve, le reboisement d'une ceinture verte sur une superficie de 10 hectares, ainsi que le traçage et la réhabilitation de 39 kilomètres de pistes, constituant les premières étapes de ce plan ambitieux. De plus, la réhabilitation des brigades de Togodo Sud et Nord, la construction de trois postes de relais et l'installation d'un pylône pour améliorer la communication au sein de la réserve sont autant de mesures visant à renforcer l'infrastructure et les capacités opérationnelles. En outre, la construction de deux étangs pour abreuver la faune sauvage traduit l'engagement envers la conservation de la biodiversité locale. La combinaison de ces actions contribuera efficacement à préserver cet écosystème unique, en bénéficiant aux générations actuelles et futures.
Des défis encore nombreux
Malgré ces appuis, de nombreux défis persistent, dans un vaste espace sauvage difficile à surveiller, nécessitant toujours plus de ressources humaines pour sa protection. "Ici, en plus de trois agents, 25 pisteurs nous accompagnent pour parcourir ces 15 000 hectares. Chaque équipe de six personnes inclut un agent forestier armé pour mener à bien les activités de surveillance", explique Gbemou Komi Mawunyo, conservateur du Parc national de Togodo Sud. "Un premier défi réside dans le terrain, avec l'absence fréquente de pistes pour les déplacements et la surveillance. Un autre défi réside dans la gestion et la maîtrise des agresseurs, souvent des braconniers, ou des individus exploitant illégalement les ressources de la réserve, créant ainsi un enjeu majeur."
Plusieurs autres partenaires, notamment la coopération allemande (GIZ), sont du reste, positionnés pour aider le pays, dans la gestion de ses aires protégées, confrontées à plusieurs défis.
Parmi les approches préconisées par les analystes pour améliorer la gestion de ces zones, figurent le renforcement des capacités humaines ainsi que l'augmentation des avantages pour les populations locales impliquées dans la préservation de ces espaces naturels. Il est également essentiel de mettre en place un nouveau cadre législatif, mieux adapté aux besoins. En ce sens, le gouvernement a adopté en mai dernier un avant-projet de loi sur la création et la gestion des aires protégées.
Ayi Renaud Dossavi