(Togo First) - Discrètement niché dans la préfecture de l’Avé, au sud du Togo, le village de Nyamessiva et ses cinq cents âmes cachent un secret à ciel ouvert. C'est le témoin silencieux de la lutte acharnée des populations contre la dégradation de leur environnement. On y pénètre en s'éloignant de la route Lomé-Kpalimé, à une dizaine de kilomètres après la ville d'Assahoun, où l'on entre dans un écrin de verdure qui tranche avec le paysage déboisé environnant. Sur le chemin, la piste serpente à travers une forêt singulièrement dense, où les essences florales semblent s'épaissir à mesure que l'on s'enfonce dans cet univers presque oublié.
La brise qui souffle dans cet espace confiné procure une sensation de bien-être qui contraste avec l'air lourd d'il y a quelques instants. Cette oasis de fraîcheur existe grâce à une ceinture forestière préservée, d'une soixantaine d'hectares, qui protège le village depuis des décennies. La forêt ainsi préservée est le fruit de nombreuses initiatives publiques, notamment, plus récemment, du projet de résilience WACA ResIP qui, loin de se cantonner à la côte et à ses grands travaux, intervient jusque dans cet océan de verdure du sud côtier.
« Nous avons compris très tôt l'importance de préserver notre forêt. Nous faisons tout notre possible pour la maintenir en vie, aussi longtemps que possible. », explique Gozan Komivi, du Comité de gestion de la forêt. Il fallait donc préserver une forêt communautaire de 80 hectares, abritant une richesse de ressources ligneuses et non ligneuses, ainsi que des espèces animales précieuses. Face aux feux de brousse répétés et au déboisement qui ont touché la préfecture, les habitants ont rapidement saisi l'importance de conserver leur biodiversité.
Préserver la forêt et soutenir les villageois
De son côté, Dr Adou Raimi Alimi, coordonnateur du projet WACA ResIP, confirme que la forêt de Nyamessiva est l'un des huit écosystèmes naturels que le projet WACA ResIP s'efforce de conserver ou de restaurer. Mais il ne s’agissait pas seulement de préserver la forêt de l’action humaine. Pour ce faire, il fallait aussi appuyer les hommes, transformer leur quotidien et les aider à trouver des alternatives.
C’est dans ce contexte que le programme WACA a investi près de 100 millions FCFA pour soutenir la communauté dans ses efforts de conservation et de développement durable. En collaboration avec le Comité Villageois de Développement (CVD) de Nyamessiva et l'ONG ATPH, le projet a mis en place un plan simple de gestion de la forêt communautaire, renforcé la lutte contre les feux de brousse, et reboisé 10 hectares de terres.
« WACA a réalisé beaucoup de choses dans le village. Et au-delà même de cela, il y a également des dispositions pour l'entretien, surtout au niveau de la population, pour l'entretien alors de ces réalisations. », selon Djogan Kofi, Président du CVD, qui retrace les œuvres réalisées par WACA ResIP Togo depuis 2020 dans son village.
Des ressources en matériel ont également été fournies, en particulier une plateforme multifonctionnelle, une dizaine de lampadaires solaires, et un périmètre maraîcher aménagé de 2,5 hectares. Les activités génératrices de revenus, telles que l'apiculture et le maraîchage, ont été lancées avec l'installation de 30 ruches et la formation de 80 bénéficiaires.
« Avant, les femmes parcouraient des kilomètres pour moudre le maïs et décortiquer le riz ; actuellement, ce n’est plus un souci. Nous sommes capables aussi de moudre nous-mêmes notre maïs », se réjouit ainsi Akpali Adjo, une femme de la localité.
Pour leur part, les ruches modernes ouvrent la voie à l’apiculture dans la localité. À Nyamessiva, d’aucuns espèrent même un nouveau virage pour cette petite communauté, tout en conservant sa forêt communautaire.
Apporter (enfin) un forage aux populations
Les défis n'ont pas manqué, entre retards et obstacles techniques, mais à l'issue de la période 2020-2023, plus de 95 % du projet a été réalisé. Dernier grand chantier pour boucler ce sous-projet, l’accès à l’eau à travers un forage.
« En milieu rural, l'eau potable n'a pas de prix », confie Yawo Komi, Coordonnateur Adjoint du WACA Togo. « C'est la seule activité qui [nous] reste, mais qui est très importante, qui est capitale pour la communauté. », selon le responsable.
« Nous n'avons pas pu réaliser cette activité jusqu'à maintenant parce que nous avons commis une entreprise pour le travail qui a fait des essais qui n'ont pas marché », confie-t-on, tout en assurant que cette dernière étape sera bouclée dans les meilleurs délais, au bénéfice de la population.
Cinq sous-projets de gestion des forêts communautaires
Globalement, Nyamessiva fait partie des cinq sous-projets initiés par le WACA dans le cadre de la gestion des forêts communautaires. On compte ainsi également le sous-projet de conservation et de gestion durable de la Forêt Sacrée Akissa (appuyé à hauteur de 89 millions FCFA), l'appui à la gestion intégrée des mangroves le long du Chenal de Gbaga (99,6 millions FCFA), l'appui à la gestion durable des mares aux hippopotames d'Afito (81,5 millions FCFA), l'appui à la mise en œuvre du Plan d'Aménagement et de Gestion de la forêt sacrée Godjé-Godjin (64,9 millions FCFA).
Ayi Renaud Dossavi
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