(Togo First) - Au Togo, l'État projette en 2024 une opération majeure de titrisation des sièges de l'UTB et IB Bank, visant à revitaliser ces banques et injecter de la liquidité dans le système bancaire.
D'après des informations confiées à Togo First par des sources proches du dossier, l'État togolais prévoit, au cours de cette année 2024, de lancer une importante opération de titrisation ciblant les biens immobiliers de deux grandes banques du pays : l'Union Togolaise de Banque (UTB), toujours sous contrôle étatique mais en cours de cession, et l'ex-banque publique, la Banque Togolaise pour le Commerce et l'Industrie (BTCI), rebaptisée IB-Bank.
Ce plan, estimé à 66,9 milliards de francs CFA, s'insère dans une stratégie dite “innovante” visant à injecter de la liquidité dans le système bancaire tout en apportant de nouvelles ressources régulières et stables aux finances publiques pour les prochaines années, indique-t-on. Cependant, il représentera un coût budgétaire qui, rien que pour cette année 2024, devrait accroître le déficit budgétaire estimé à 5,6% du PIB de plus d'un point de pourcentage.
“L'opération envisagée par l'État consiste à racheter les sièges et divers immeubles de ces institutions bancaires. Ces actifs immobiliers seront par la suite convertis en titres financiers. Ceux-ci pourront être acquis par des investisseurs, peut-être d’autres banques de la place ; c’est une option”, explique notre source. Cette transformation d'actifs tangibles en instruments financiers liquides est une démarche peu commune dans le paysage financier togolais. Des entités telles qu'Orabank et la BOAD ont déjà utilisé la titrisation pour liquéfier une partie de leur bilan, en particulier par la vente de créances.
Une bouffée d'oxygène pour les banques UTB et IB Bank : cette initiative devrait présenter un double avantage. D'un côté, elle promet un bol d'air financier à l'UTB (qui n’est pas encore cédée) et à IB-Bank, des institutions en proie à des difficultés comme la faiblesse de liquidité et des pressions réglementaires. Cette manne financière devrait leur permettre un redressement notable, espère Lomé. Un enjeu crucial dans un contexte économique et réglementaire exigeant où la BCEAO vient de rehausser le capital social minimum, qui passe à 20 milliards FCFA.
Fin 2019, la BTCI, avant de devenir IB Bank Togo, affichait des fonds propres négatifs de 11 milliards FCFA, avant de passer en zone verte avec en 2021, sous l’effet d’une restructuration. À la suite de son acquisition par IB Holding, propriété de Mahamadou Bonkoungou, des mesures ont été mises en œuvre pour renforcer les fonds propres de la banque. Ainsi, son capital social a été augmenté de l’équivalent de 20 milliards FCFA, porté à 27 milliards FCFA, dépassant ainsi les exigences prudentielles. Pour IB Bank (ex-BTCI) qui est déjà privatisée, la vente de son siège social à l'État lui permet de libérer du capital immobilisé dans un actif non liquide, ce qui devrait immédiatement améliorer sa liquidité et potentiellement ses fonds propres, surtout qu’elle a accumulé des pertes importantes avant son rachat.
De son côté, l’UTB continue de naviguer dans des eaux troubles et a connu des difficultés à trouver un repreneur, d’autant que sous-capitalisée selon la nouvelle norme, elle affichait des fonds propres fortement négatifs en 2021. “Le but de cette opération, simple mais stratégique, est de donner un nouvel élan aux banques togolaises. En rachetant leurs immeubles, l'État veut transformer ces actifs immobiliers en liquidités précieuses” pour l’UTB, qui est actuellement en pourparlers avec Coris Bank du Burkinabé Idrissa Nassa pour son rachat, tandis que l’ex-BTCI a été rachetée par un autre Burkinabé, Mahamadou Bonkoungou. D'autre part, une telle opération créera une nouvelle source de revenu pour l'État sous forme de loyers, puisque les banques continueront d'occuper ces bâtiments, justifient les autorités togolaises.
Fiacre E. Kakpo