(Togo First) - Le 17 juin dernier, le gouvernement togolais a annoncé qu’il venait de finaliser le deuxième cycle de son emprunt international. En réussissant à mobiliser 150 millions € en pleine crise du coronavirus où les marchés semblaient tendus, le Togo a eu la main heureuse. D’autant que la communauté des investisseurs a semblé modérer le risque d’une telle opération soutenue par une garantie de l'Agence africaine d'assurance commerciale (ATI).
Le taux d’intérêt très favorable de 4,5% démontre clairement l’appétit d’un marché, qui fuyant la volatilité accrue des actifs occidentaux, a jeté son dévolu sur les économies en développement, désormais devenues une sorte de « valeur refuge ».
Le produit de l’opération qui bénéficie d'un profil d'échéance favorable de 10 ans devrait être utilisé pour rembourser la dette intérieure plus coûteuse et à plus court terme.
Alors qu’il avait envisagé plusieurs options, dont un eurobond de 500 millions $, le Togo a dû s’ajuster aux nouvelles conditions du marché pour privilégier un emprunt auprès de créanciers internationaux du secteur privé.
Ainsi, l’opération de reprofilage a démarré en décembre 2019 avec un premier emprunt de 103,6 millions d’euros (68 milliards de francs CFA) à l’extérieur à un taux d’intérêt de 4,68 %, une échéance de 10 ans et un délai de grâce de 2 ans. Avec cet emprunt, Lomé anticipe le remboursement de 66,6 milliards FCFA de dette intérieure et régionale en janvier 2020, assortie des taux d’intérêt d’environ 7 % et des échéances de 3 et 8 ans.
130 millions d’euros sécurisés
Le produit de l’opération qui bénéficie d'un profil d'échéance favorable de 10 ans devrait être utilisé pour rembourser la dette intérieure plus coûteuse et à plus court terme.
Pour les agences de notation, dont Moody’s qui, deux mois plus tôt, dressait un tableau assez sombre de l’économie togolaise, le recours aux marchés internationaux est un succès pour le Togo.
Selon l’agence américaine, le rééchelonnement de la dette devrait réduire les coûts du service de la dette du Togo d'environ 130 millions d'euros (1,6 % du PIB de 2020) au cours des trois prochaines années. On s’attend à ce que cette orientation contribue également à réduire les risques de liquidité liés aux importants besoins de refinancement. Ces besoins estimés à près de 18% du PIB, uniquement pour 2020, avaient précipité fin 2016 le pays, alors très endetté (82% du PIB), à se faire chaperonner par le Fonds monétaire international (FMI).
Si le programme avec le FMI a permis à l’exécutif d’accélérer le train de l’assainissement de ses finances, les pressions de refinancement se pointaient à l’horizon.
Selon des données officielles de début 2019, 18,3% de la dette domestique devrait être remboursée totalement au cours de l’année. Les mêmes statistiques estimaient que, globalement, la dette intérieure devrait échoir dans 3,8 ans, alors que 2020 pourrait être une année charnière pour les remboursements. Si l’onction FMI a été vite donnée, mais conditionnée, les autorités togolaises ont toutefois pris le temps d'explorer les pistes.
Fin 2019, période faste
Lorsque les autorités togolaises ont émis l’idée de recourir au marché financier international pour les toutes premières fois, le FMI avait fini par imposer un plafond sur le montant. Pas plus de 8% du PIB et la valeur actuelle nette de la dette devrait être surveillée rigoureusement.
La Banque mondiale, qui avait, à plusieurs reprises, annoncé qu’elle donnerait sa garantie via son guichet IDA, s'est rétractée quelques mois après l’arrivée du très libéral David Malpass à sa tête. L’ancien patron de Bear Stearns a suspendu la garantie au profit d'une injection directe de cash.
Le pays rembourse ses dettes, dégage même un excédent budgétaire, dons y compris de 2,1%.
Le Togo s’en sort avec un appui budgétaire record de 150 millions $, mais maintient son premier rendez-vous sur les marchés financiers internationaux, en cette heureuse fin d’année 2019 où tout semble lui sourire. Le pays rembourse ses dettes, dégage même un excédent budgétaire dons y compris de 2,1%.
Le pays devient le seul pays à respecter les critères de convergence. Scénario inespéré, d’autant que son ratio d’endettement très élevé, deux ans plus tôt, le destinait au cortège des pays qui feraient piétiner le passage à l’Eco.
« Les autorités ont procédé à la restructuration d’une première tranche de dette, ce qui a réduit légèrement la valeur actuelle nette de la dette publique totale, tout en préservant la notation du risque d’endettement extérieur, conformément au programme appuyé par le FMI », se satisfont les experts du FMI en mars 2020, dans un contexte de début apparent de la Covid-19 où les perspectives économiques ont été revues drastiquement à la baisse.
Fiacre E. Kakpo