(Togo First) - L’entrepreneuriat se révèle être la piste de salut pour certains jeunes qui décident de prendre leur destin en main. Ali Ouro-Bossi, un jeune dont le parcours professionnel a été fait de hauts et de bas, a décidé de changer radicalement de paradigme et de mettre en place une unité de boucherie moderne Halaal, baptisée Albaraka Délices. Du journalisme à la boucherie, ce jeune n’a pas trouvé rebutante la perspective d’une telle reconversion. Il a eu l’idée et le dispositif institutionnel d’accompagnement des jeunes mis en place par le gouvernement lui a prêté main forte dans son plan de création d’une microentreprise. A deux niveaux précisément : la formation à la gestion d’une microentreprise assurée par l’ANPE, et la mise à disposition du financement nécessaire. Le profil de ce jeune entrepreneur nous a intéressés. Togo First l’a approché pour qu’il nous parle de son parcours.
Togo First (T.F) : Comment vous est venue l’idée de monter une unité de boucherie moderne ?
Ali Ouro-Bossi : Je suis philosophe de formation ; j’ai une maîtrise en philosophie du développement. Après, j’ai exercé le journalisme ; j’ai fait la radio, la télévision, la presse écrite également. L’idée de créer cette unité de boucherie moderne est née à partir du moment où nous avions décroché et perdu deux fois de suite un boulot. Donc je me suis dit pourquoi ne pas chercher un emploi pour moi-même et qui n’a pas de fin. C’est le point de départ de notre idée. En plus, quand j’avais eu mon premier boulot, j’observais comment mon patron faisait ses transactions ; comment il était libre financièrement. Je me demandais au vu de ce qu’il nous payait, si ce n’était pas plus avantageux pour moi-même de devenir un patron d’entreprise. Lorsque nous avons eu l’idée de créer cette boucherie, nous nous sommes confiés à l’Agence Nationale Pour l’Emploi (ANPE), qui nous a heureusement permis d’avoir une formation qualifiante.
T.F : Comment vivez-vous cette reconversion, de la plume ou du journalisme à la boucherie ?
Ali Ouro-Bossi : il n’y a aucun problème avec cela ; dès lors que ce changement de cap nous permet d’avoir une meilleure autonomie financière et d’avoir des perspectives positives, nous sommes heureux dans ce nouveau métier.
T.F : Qu’est-ce qui fait la différence entre votre boucherie et les autres ?
Ali Ouro-Bossi : La différence est nette. D’abord, nous sommes sous un toit ; ce que la plupart de boucheries n’ont pas ; ensuite lorsque nous amenons notre viande, elle est traitée et conservée au frais directement ; les autres n’ont pas cela. Sur le plan de l’hygiène, notre viande n’a pas de contact avec les mouches et la poussière.
T.F : Qu’avez-vous trouvé comme aide sur votre chemin ?
Ali Ouro-Bossi : Nous avons eu droit à une aide colossale ; nous avons reçu une formation gratuite, imputée à un financement de l’ANPE et de ses partenaires. Nous avons été encadrés par le FAIEJ (NDLR : Fonds d’appui aux initiatives économiques des jeunes) et avons eu notre financement pour démarrer. Nous n’avions pas de plan d’affaires, mais le processus de financement nous a obligés à en rédiger un. Après pour le crédit, nous l’avons déjà remboursé au 2/3. Vous savez, notre unité se portait bien jusqu’au début de la crise politique qui ralentit nos activités. Actuellement, nous sommes d’ailleurs près des difficultés de paiement. Nous avons remboursé jusqu’au dernier mois, mais nous nous trouverions carrément en difficultés de paiement si la crise perdurait.
T.F : Au vu de vos succès et de vos difficultés, quel conseil pourriez-vous donner à un jeune qui a bien envie de se lancer dans l’entrepreneuriat ?
Ali Ouro-Bossi : En fait, mon conseil est direct ; c’est de dire à mes frères et sœurs togolais que le meilleur emploi, c’est celui que l’on crée soi-même. Donc à chacun de se débarrasser de l’idée selon laquelle il est difficile de se donner un boulot. C’est facile si l'on s’y met et si on se renseigne également, parce qu’aujourd’hui, il y a tellement d’opportunités et de facilités, mais le manque d’information fait que les gens n’arrivent pas à trouver les canaux pour créer leur propre emploi.
T.F : Quel sera votre prochain challenge ?
Ali Ouro-Bossi : Nous pensons élever notre boucherie à un niveau de certification Halaal. Donc nous sommes en train de postuler pour la norme Halaal. La certification Halaal, c’est un modèle qui voudrait que les viandes soient traitées dans les normes de l’Islam. Même les viandes qui nous viennent de l’Europe doivent avoir cette certification avant d’être consommées ici. En dehors de cela, une fois à cette étape, nous voudrions créer une boucherie type qui sera dupliquée plus tard dans la ville de Lomé, au Togo, pourquoi pas dans la région ouest-africaine.
Propos recueillis par Séna Akoda