(Togo First) - Le président Faure Gnassingbé a nommé Jean Marie Koffi Ewonoulé Tessi au poste de Ministre de l'Accès Universel aux Soins vendredi 08 septembre dernier. Ce choix stratégique intervient à un moment où la Couverture Maladie Universelle (CMU) occupe une place de plus en plus centrale dans les plans gouvernementaux.
Rattaché à sa création au portefeuille de la Santé, le ministère de l'Accès Universel aux Soins, instauré en septembre 2020, gagne ainsi en autonomie par rapport au ministère de la Santé. Cette indépendance institutionnelle coïncide avec une hausse significative du budget alloué à la CMU, qui passe de 19 milliards de FCFA en 2022 à 21 milliards de FCFA pour l'année en cours, soit 16 % du budget total du domaine de la santé. Selon le gouvernement, cette augmentation budgétaire vise à accélérer la mise en œuvre de l'Assurance Maladie Universelle (AMU), un projet prioritaire confié à l'Institut National d'Assurance Maladie du Togo (INAM).
Afin de légaliser la CMU, une loi (n° 2021-022 du 18 octobre 2021) a été adoptée fin 2021. Elle établit un objectif ambitieux mais graduel : couvrir 60 % de la population d'ici à 2025. Dans un pays où seulement 10 % de la population est couverte par une protection sociale, majoritairement des fonctionnaires et des salariés du secteur privé, le défi est de taille.
Ancien Directeur de GTA Assurances, passé notamment par NSIA Assurances–Togo, FEDAS TOGO (devenue OGAR ASSURANCES TOGO) et Beneficial Life Insurance Togo, actuellement Groupe Prudential, Ewonoulé n'est pas un novice dans le secteur de la couverture sociale.
Son recrutement pour ce portefeuille semble un choix tactique.
Avec une riche expérience dans le secteur de l'assurance, il dispose d'un bagage qui pourrait s'avérer crucial pour l'élaboration d'un modèle économique viable pour la CMU.
« Avec une solide expérience de plus de vingt ans dans le secteur des assurances, il possède une compréhension approfondie des systèmes de gestion des risques, ce qui pourrait être pertinent pour l'accès universel aux soins de santé », estime un consultant international spécialisé en assurance.
La mission qui attend le nouveau ministre est colossale. Il devra trouver un équilibre entre un panier de soins approprié et des options de financement innovantes et durables. Cela s'avère d'autant plus complexe dans un contexte où la pénétration assurantielle au Togo reste très faible.
Le chemin sera long, car même si le gouvernement a fait des efforts importants ces dernières années, ’l'Organisation mondiale de la santé (OMS) note que le Togo doit augmenter son budget de santé de plus de 50% pour atteindre la couverture sanitaire universelle, tout en indiquant que la forte dépendance vis-à-vis des partenaires techniques et financiers, est une vulnérabilité à laquelle il faudra s’attaquer.
Selon l’expert qui est passé notamment par CIPRES (Conférence interafricaine de la prévoyance sociale), la mise en œuvre de l'AMU nécessitera une collaboration étroite entre différents acteurs, y compris les assureurs privés et les organisations à but non lucratif, le gouvernement et le secteur privé. Dans ce contexte, l'expérience d'Ewonoulé dans le privé, notamment comme Secrétaire Général de l’Association des Grandes Entreprises du Togo (AGET), pourrait être un atout.
Au-delà de ces enjeux, le défi de la mise en œuvre de l'assurance maladie universelle demeure complexe et multidisciplinaire, impliquant des questions de couverture géographique, de qualité des soins et de viabilité du modèle. À cet égard, Lomé a récemment lancé un vaste programme de réhabilitation et de construction de structures de soins, avec le soutien de partenaires internationaux comme la Banque mondiale et la Banque Africaine de Développement.
En parallèle, diverses initiatives comme le programme Wezou, qui vise à garantir des soins maternels gratuits pour toutes les femmes enceintes, ont également vu le jour ces dernières années afin de progresser vers la couverture sanitaire universelle.
Fiacre E. Kakpo