(Togo First) - Niché au cœur de la campagne agricole de Kolokopé, à quelques dizaines de Kilomètres de la ville d'Atakpamé (161 km de Lomé), le Centre de Recherche Agronomique des Savanes Humides (CRASH) a au prime abord, des allures de ferme agricole. On y accède par une longue voie, qui coupe à travers champs, savanes et ravins, croisant des camions chargés de récoltes, en plein cœur d'une zone agricole.
C’est le bétail qui accueille : des centaines de têtes rentrées de pâturage, se ruent dans leur enclos, dans une docile et bruyante chorégraphie. Ce sont des espèces de chèvres améliorées, sélectionnées pour leur rendement et leur résistance aux parasites, et qui constituent le cœur d’activité du CRASH :
La bergerie avec ses espèces améliorées : des chèvres Djallonké
Fondée en 1982, cette antenne de l’Institut Togolais de Recherche Agronomique (ITRA) aux bâtisses vétustes renaît peu à peu de ses cendres, après une longue traversée du désert.
Cet avant-poste de la production d’espèces améliorées d’ovins et caprins va retrouver du poil de la bête, grâce à l’appui d’initiatives comme le PPAAO (Programme de Productivité Agricole en Afrique de l'Ouest), un projet régional financé par la Banque mondiale, coordonné à l'échelle régionale par le CORAF, une institution de suivi, mandatée par la CEDEAO. Le PPAAO vise à booster la productivité du secteur agricole à travers la mise à disposition de nouvelles technologies, notamment.
Centre de Recherche Agronomique des Savanes Humides- Kolokope
Des centaines de millions d’investissements auront permis de mettre chaque année à la disposition des éleveurs commerciaux nationaux, des géniteurs performants (des chèvres Djallonké, une espèce trypano-tolérante).
Le centre a ainsi pu culminer à une production annuelle moyenne de 250 géniteurs en tout, en hausse de 150% par rapport à ses performances antérieures. Ces animaux vont alimenter un marché à fort potentiel : au Togo, les chèvres constituent la seconde espèce d’élevage, après les volailles, en termes d’effectif.
Le bouc Djallonké, est ainsi au menu des restaurants un peu partout dans le pays. Les caprins sont également sacrifiés lors des funérailles, mariages, sacrifices, fêtes de fin d’année ou des baptêmes, pour parfois, la propitiation des dieux. Pour peu symbolique, la culture du Mouton sacrificiel est une pratique culturelle qui a aussi, indépendamment de l'islam, traversé les siècles.
Cette affection s’exprime d’ailleurs dans les chiffres : en termes de pourcentage au niveau national, plus du quart des ménages agricoles (27,8 %) élève des ovins, et plus de la moitié (51,4 %) des caprins. A titre d’exemple, seulement 21,1 % élèvent des porcins, et 6,2 %, les bovins.
Les chèvres et moutons sont présents, en particulier dans les élevages familiaux de taille modeste, contrairement aux bovins, plus concentrés chez des pasteurs, peuls notamment.
Un marché de bétail au Togo
Des défis encore importants
Si les succès sont au rendez-vous, la filière a tout de même encore de nombreux défis à relever pour atteindre l’autosuffisance, alors même que la demande ne fait que croître.
Ces chiffres, en hausse soutenue, étaient de 5,5 milliards FCFA l’année suivante, et environ 6,5 milliards FCFA en 2012, d’après la FAO.
Le challenge se pose, encore, en termes de faiblesse de performances. La faible diffusion des races améliorées - en compétition des races locales moins performantes - difficulté d’accès au crédit, et faible structuration des acteurs du secteur, constituent encore des handicaps importants.
Autant de défis que le Togo travaille à relever, avec l’appui de partenaires comme la Banque mondiale.
Au plan national, on compte des projets de développement intégrés, qui incluent tous, un axe d’appui à l’élevage de bovin et ovin-caprin. Notamment le Projet de Développement Rural Intégré de la plaine du Mô (PDRI-Mô), le Projet de Développement Rural de la plaine de Djagblé (PDRD), sous coupole actuellement du PND (Plan national de développement). Ce Plan, après une année rendue très difficile par la Covid-19, se reformule justement, pour se centrer encore plus sur l’agro-industrie.
Il faut rappeler également le PNIASA (Programme National d’Investissement Agricole pour la Sécurité Alimentaire), dont le PPAAO est une sous-partie, lancé au début de la décennie précédente, et financé à hauteur de 233 milliards FCFA, par la Banque mondiale entre autres.
A côté, des initiatives comme le MIFA (Mécanisme incitatif de financement agricole fondé sur le partage de risque, lancé en 2018), ces projets veulent apporter plus de ressources financières aux producteurs, pour alimenter et développer des chaînes de valeur agricole, y compris l’élevage.
Sur le plan technique, il s’agit notamment d’aller vers des bergeries traditionnelles améliorées, et de renforcer la vaccination.
Une des bergeries modernes du centre
Le même programme, avait, en amont, facilité la création de 500 bergeries, et appuyé des milliers d’éleveurs dans le pays.
Enfin, relever ce défi, selon les experts de la FAO, passera par une recherche plus intensive, afin d’améliorer davantage le rendement des espèces exploitées. C’est dans cette perspective que l’intervention des structures comme le Centre de recherche de Kolokopé, pourrait être encore plus décisive.
A ce jour, le secteur de l’élevage représente plus de 16% du PIB agricole et 6,7% du PIB national togolais. Cependant, si l’agriculture emploie environ 65% de la population active, seulement 1,6%, déclare avoir l’élevage comme activité principale.
Ayi Renaud Dossavi